À Manolo Pesantes
Seulement pour déranger, seulement pour ça,
pratiquer une douche au compte-gouttes,
fatiguer la fatigue, désespérer les pleurs…
Pour déranger, seulement pour ça,
sortir sans rythme à un boulevard pressé,
retourner à nos points cardinaux,
interrompre la cheville, faire demi-tour,
et s’habiller d’insultes avec du sucre
sur le visage
Seulement pour déranger,
seulement pour ça,
dormir debout à l’attente de l’attente,
et exercer l’épaule qui provoque
et heurter de face un vieux
et le serrer dans ses bras avec des
insultes d’un autre temps…
(Garder silence sur les trottoirs d’un
autre assaut,
encourager la bousculade d’un
bâillement,
réfuter la vérité d’un évangile,
regarder la nuit à contresens
et du coup inventer le mot
déracinement)
Seulement pour déranger
laisser dans l’heure une traînée de racines qui
incommode,
s’effeuiller les mains, défricher les rêves
et que le vent nous secoue,
seulement pour ça…
et pour que jamais ne demeure le
temps d’être temps
Javier Vargas de Luna, « Café DU RETOUR nº 3 », Sans Anna et sans sucre/Sin Anna y sin azúcar, Écrits des forges, 2014, p.141 et 143.